Publié dans la categorie Jets d’encre 2015

Au pied de la cathédrale – Mireille Delcroix

Il exècre tout ce qui fait le pittoresque du canal suspendu, ses écluses, et ses alentours. Animé d’incessantes marées artificielles le jour, le canal charrie des cohortes de bateaux qui montent et descendent comme des bouchons au gré de l’écluse du Port-Neuf.
Il déteste la frénésie turbulente des gamins, les joggeurs qui envahissent les pavés, les couples d’amoureux qui s’enlacent en cheminant, les photos souvenirs des badauds avec en arrière-plan la belle Saint Nazaire. Il peste contre les petits vieux bancals qui viennent se distraire en regardant les manœuvres de l’éclusier. Et plus que tout, il hait l’avalanche de lumière quotidienne qui met les touristes en extase et transforme les lieux en carte postale idéale.

La tache rouge – Sarah Benkeder

Je n’arrive plus à respirer, je suffoque. L’air n’entre pas dans mes poumons et veut m’étrangler, je ne peux plus respirer, je vais m’étouffer.
Je ne sais pas où je suis, où est-ce que je suis ? Partout, tout autour de moi, tout ce que je vois : du rouge.
Du rouge et il s’emballe, s’étale, m’avale, et je ne vois rien, rien d’autre, ne suis rien, rien d’autre que ce rouge qui m’entoure, qui me cerne et je ne veux pas qu’il m’absorbe. Je ne veux pas qu’il m’engloutisse, je ne veux pas disparaitre.

Albert coule – Vincent Lescure

Le soir les cueille sur un banc. Intimidés, ils restent impassibles. Est-ce le lac qu’ils contemplent ? Les collines qui les enlacent ? Les ombres ont disparu mais la ville rayonne. Le vent est tombé et l’air devient tiède. En ce soir du 25 décembre, le jour s’efface drôlement tôt sur la lagoa de Rio de janeiro.

La course – Emmanuel Artiges

Il est 18 h quand je ferme la porte du bureau. Derrière moi la montée d’escaliers qui mène au troisième ne me verra plus avant une douzaine d’heures, et ce délai me semble encore trop court. Je ne prends pas le temps de respirer à pleins poumons l’air extérieur après une journée passée dans une salle fermée, la solitude encore imparfaite ne me suffit pas. La rue dans laquelle je m’insère est trop peuplée à mon goût. Après quelques passages piétons aux feux de couleurs impérieuses dans le crépuscule qui tombe, je trouve mon sanctuaire.
Enfin.

Le prisme de la nuit – Florian Richelmy

BLANC
Nous partîmes cinq cents ; mais par un désaccord,
Un abîme sanglant divisa nos monarques.
Ici nous posons pied, en amarrant nos barques :
Tout est blanc, tout est nu, en arrivant au port.

« Pause ! »