« Pardonnez-moi mon Père car j’ai péché.
Péché d’orgueil car nul autre que Le Seigneur ne m’a semblé digne d’ouïr ma confession. Vous Seul savez combien l’humble serviteur que je suis a sacrifié l’essence mortelle de son être à sa communauté. Le Malin prend moult visages mais mon œil, guidé par mes prières, les a débusqués et mon doigt vengeur s’est abattu sur eux.
Sous ma férule, Votre Demeure s’est enrichie de vitraux et d’ors, comme il sied à votre mesure. Malheureusement, on trouve nombre d’ingrats chez le menu peuple qui ne songe qu’à son ventre et geint contre la dîme à Ta Gloire, quand il lui faudrait se soucier de sa rédemption. Et cet au-delà est maintenant si proche.
Le crépuscule vient de déposer son obscur manteau sur les chaumines et l’aube ne poindra point. Les trompettes de l’Apocalypse feront résonner leur chant funèbre et la Résurrection nous éveillera à Tes côtés.
Certes, j’ai parfois succombé au péché de la chair mais c’était pour Ta Gloire la plus grande. Celles qui ont accepté mes faveurs ont souvent mis par la suite leur vie à Ton Service et comptent parmi tes nonnes les plus dévouées. Celles qui refusaient ou menaçaient par leurs paroles l’intégrité de Notre Église ont brûlé sur mon ordre en criant Ton Nom. Ces sorcières ont accru Ta Puissance. Les accusations que j’ai dû leur porter étaient nécessaires : le peuple n’aurait pas compris qu’on brûle ses filles pour Ta Grandeur. Les larmes des mères ont nourri les fleuves de la Foi : au soir du monde chrétien, Ton Rayonnement éclaire tout l’occident et m’emplit de cette fierté si humaine, pour en être l’un des rouages divin. Ma pierre, si modeste fut-elle, participe à Ton Edifice.
C’est pourquoi, à quelques heures du Jugement, je cloue ce parchemin sur ma porte, que Tes Anges lisent qu’ici réside Ton Serviteur le plus dévoué et qu’ils me placent à Ta Droite, au plus haut des cieux. »
Archevêque Enguerran d’Herblain
L’an de grâce 999 de l’ère de Notre Seigneur